AFP - vendredi 10 avril 2009, 17h11
le gouvernement ménage les épargnants
Le taux du livret A sera ramené à 1,75% le 1er mai, contre 2,5% actuellement, soit son plus bas niveau depuis environ 200 ans, mais le gouvernement a cependant choisi d'en limiter la baisse pour ménager des millions d'épargnants.
C'est la troisième fois en 15 mois que le gouvernement déroge à la formule d'ajustement automatique du taux du Livret A, instaurée en 2003 pour dépolitiser ce sujet très sensible.
Cette formule aurait ramené à 1% le taux du Livret A, qui est susceptible d'être modifié quatre fois par an, les 1er février, mai, août et novembre, aux termes de la législation.
Pour justifier cette décision, le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer, qui émet une recommandation sur le taux, a fait état d'"un risque de déstabilisation des circuits de l'épargne", "qui pourrait créer une inquiétude chez les épargnants".
La fixation du taux du Livret A à 1,75% "préserve le pouvoir d'achat des épargnants et l'attractivité" de ce produit, a fait valoir la ministre de l'Economie Christine Lagarde.
"Ils étaient probablement inquiets" qu'une très forte baisse à 1% ne "participe à la grogne sociale", analyse pour sa part Cyril Blesson, directeur de la recherche économique au sein du cabinet Seeds Finance.
Avec 46 millions d'exemplaires à la fin 2008, auxquels sont venus s'ajouter 6 millions de livrets supplémentaires depuis le début de l'année, le Livret A occupe, en effet, une place particulière dans le coeur des Français.
Pour autant, "si l'inflation reste basse et proche de zéro, nous devrons réexaminer la rémunération au mois d'août," a-t-on averti vendredi dans l'entourage de Mme Lagarde.
Malgré la limitation de la baisse, le passage en dessous de 2% pour la première fois depuis la création du Livret A en 1818 devrait engendrer un "net coup de frein à la collecte", qui a atteint des sommets fin 2008 et début 2009, selon M. Blesson.
Le passage de 4% à 2,5% le 1er février avait déjà pesé sur la popularité de ce produit défiscalisé et liquide (retraits et dépôts sans frais et à volonté) qui en avait fait le produit idéal en temps de crise financière.
Cette nouvelle baisse mesurée permet en tout cas ne pas pénaliser le financement du logement social, étroitement lié au taux du Livret A, mais aussi les conditions de crédit en général.
Ne pas modifier le taux serait revenu à "créer un obstacle artificiel en France à la répercussion de la baisse des taux de la BCE (Banque centrale européenne) sur le taux des crédits", favorable à la reprise, a ainsi jugé M. Noyer.
Le taux du Livret A est normalement calculé en fonction de l'inflation, mais aussi des taux du marché monétaire, qui ont fortement baissé ces derniers mois dans le sillage de ceux de la BCE.
Ne pas baisser le taux du Livret A "serait empêcher que la politique monétaire de la zone euro puisse pleinement contribuer au retour de la croissance dans notre pays", a ajouté M. Noyer.
La baisse du taux du Livret A devrait, en effet, entraîner une baisse de la rémunération de l'ensemble des livrets réglementés (notamment le LDD, ex-Codevi), mais aussi des livrets ordinaires et des comptes à terme, que les banques choisissent d'ordinaire d'aligner sur ceux du Livret A.
Elle devrait donc diminuer le coût des dépôts pour les banques et permettre par ricochet "une diminution des conditions d'emprunt pour les entreprises et pour les ménages", espère Mme Lagarde.
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